|
|
" Écrire, c'est
brûler vif, mais c'est aussi renaître de ses cendres. "
Né le 1er septembre 1887 à la Chaux-de-Fonds
en Suisse d'une mère écossaise et d'un père suisse, Blaise Cendrars s'appelait
en réalité Frédéric Sauser. Habitué à voyager dès son plus jeune âge au
gré des affaires paternelles, il fugua (enfin ce n'est pas sûr) à 16 ans
et prit le premier train venu qui l'emporta jusqu'à Moscou où il fût apprenti
chez un horloger. Puis d'autres trains, des paquebots, des avions, des
automobiles le menèrent aux quatre coins du monde, de l'Inde au Brésil,
de New-York à Paris, de Bruxelles à Londres. Pour survivre, il fît plusieurs
métiers, apiculteur, scénariste à Hollywood, cultivateur de cresson, vendeur
de cercueils, de couteaux de poche, de tire-bouchons...
Il revient à Paris en 1907 et vit la bohème, fraye avec tous les milieux,
fréquente tout le monde. Ce boulimique de vie aimait brouiller les pistes
et raconter des histoires, créant au gré de ses voyages et de ses humeurs,
sa légende personnelle. Ne prétendait-il pas avoir partagé une chambre
minuscule à Londres ou à Bruxelles avec celui qui allait devenir Charlie
Chaplin, avoir enfermé des dizaines de manuscrits dans des coffres-forts
en Amérique du Sud dont il disait avoir oublié les combinaisons, il poussera
même la plaisanterie jusqu'à faire croire au directeur des éditions Mercure
de France qu'il fût obligé, pour chauffer un hôtel de Pékin, de brûler
des milliers de livres de cette maison d'édition lors du terrible hiver
de 1904, alors que l'on est à peu près sûr qu'il n'a jamais mis les pieds
dans la capitale chinoise et qu'à cette époque, il était à Moscou. On
crut même pendant longtemps que le livre qu'il mettait en tête de sa bibliographie
La légende de Novgorod n'existait pas jusqu'à ce qu'un exemplaire
de ce poème soit découvert en 1996 chez un antiquaire bulgare.
Par contre, on sait que ses débuts furent difficiles au point qu'il vola
L'Hérésiarque de Apollinaire sur un étalage de la librairie Stock.
Larcin qui le mena tout droit à la prison de la Santé.
Et si, avec la parution des Pâques à New-York, vînt la reconnaissance,
la fortune ne suivit pas pour autant. Néanmoins, cette publication lui
permit de se faire un nom et de rencontrer Apollinaire, Soupault, Desnos,
Cocteau, Léger, Modigliani, Soutine, Picasso, Chagall, Sati et de se lier
d'amitié avec eux.
Marié en 1914 et père de famille, Blaise Cendrars s'engage dans la Légion
quand débute la première guerre mondiale. En septembre 1915, il est grièvement
blessé dans l'attaque de la ferme Navarin et perd son bras droit.
Mais la guerre ne meurtrira pas seulement son corps, elle changera aussi
son regard sur la vie parisienne. Et même s'il continue d'habiter la capitale
française où le nom de Cendrars est de plus en plus à la mode, et même
s'il multiplie ses activités, travaillant avec Abel Gance sur le film
La Roue, puis sur J'accuse, assurant la direction littéraire
des éditions de La Sirène, rédigeant articles sur articles, publiant ses
poèmes illustrés par Modigliani ou Léger, participant au ballet La
Création du Monde, l'agitation du milieu artistique avec ses revendications,
ses manifestes, ses proclamations tapageuses, tout cela l'ennuie et il
ne s'y reconnaît plus. Alors après sa rencontre avec Oswald de Andrade,
peintre brésilien, et Paulo Prado, magnat du café et mécène, Blaise Cendrars
s'embarque pour le Brésil.
Il a déjà quitté femme et enfants depuis quelques années déjà pour suivre
Raymonne Duchâteau, comédienne, et il aspire à de nouvelles aventures,
de nouveaux horizons, et le Brésil était à cette époque en plein essor,
renvoyant au reste du monde l'image d'un paradis encore intact.
À son retour en France, il commence la rédaction du roman L'Or
qui sera publié en 1925 et dont le succès immédiat assoit définitivement
sa réputation. Puis l'année suivante, c'est Moravagine, dont il
prétendra avoir écrit dix-mille pages en une seule nuit, "ma plus belle
nuit d'écriture", disait-il.
Alternant voyages et reportages, poèmes et romans, Hollywood pour Paris-Soir,
Espagne, Portugal, de nouveau le Brésil, Blaise Cendrars est un homme
pressé. Mais la seconde guerre mondiale éclate et ravage, encore une fois,
l'Europe puis le reste de la planète. Aventurier, certes, mais surtout
témoin de son temps, Blaise Cendrars s'engage comme correspondant de guerre
pour l'armée anglaise.
Après la capitulation de juin 40, il cesse d'écrire durant trois ans et
se réfugie à Aix-en-Provence. Sa plus longue période d'inactivité jusqu'alors.
Mais le feu n'est pas mort, la braise reste chaude, prête à raviver ses
flammes au moindre souffle. Souffle qui l'emportera en août 1943 et c'est
L'homme foudroyé. Premier livre de la série qui verra paraître,
La main coupée, puis, Bourlinguer.
Il y aura encore Les lotissements du ciel et La banlieue de
Paris avec des photographies de Robert Doisneau.
En octobre 1949, il se marie avec Raymonne en Suisse. Modérant ses activités,
il termine Emmène-moi au bout monde !... en 56, livre qu'il avait
commencé en 47 et l'année suivante paraît sa dernière publication, Trop
c'est trop.
Après une attaque qui le paralyse à moitié en 1959, Blaise Cendrars meurt
à Paris le 21 janvier 1961.
Olivier
Lecerf
BIBLIOGRAPHIES
:
Les Pâques, Paris, Les Hommes nouveaux, 1912
Prose du Transsibérien et de la petite Jeanne de France, Les Hommes
nouveaux, 1913
Séquence, Paris, Les Hommes nouveaux, 1913
La guerre au Luxembourg, Paris, Niestlé, 1916
Profond aujourd'hui, Paris, A La Belle Edition, 1917
J'ai tué, Paris, A La Belle Edition, 1918
Le Panama ou les aventures de mes sept oncles, Paris, La Sirène,
1918
Dix-neuf poèmes élastiques, Paris, Au Sans Pareil, 1919
Du monde entier (Les Pâques à New-York, La Prose du Transsibérien et
de la petite Jeanne de France, Le Panama ou les aventures de mes sept
oncles), Paris, La Nouvelle Revue Française, 1919
La Fin du Monde filmée par l'ange Notre-Dame, Paris, La Sirène,
1919
Anthologie nègre, Paris, La Sirène, 1921
Documentaires (Kodak), Paris, Stock, 1924
Feuilles de route : Le Formose, Paris, Au Sans Pareil, 1924
Eloge de la vie dangereuse, Paris, Les Ecrivains Réunis, 1926
L'Eubage, Paris, Au Sans Pareil, 1926
Moravagine, Paris, Grasset, 1926
Petits contes nègres pour les enfants des blancs, Paris, éditions
du Portique, 1928
Le Plan de l'Aiguille, Paris, Au Sans Pareil, 1929
Les Confessions de Dan Yack, Paris, Au Sans Pareil, 1929
Une nuit dans la forêt, Lausanne, Editions du Verseau, 1929
Comment les Blancs sont d'anciens Noirs, Paris, Au Sans Pareil,
1930
Rhum, Paris, Grasset, 1930
Vol à voile, Lausanne, Payot, 1932
Panorama de la Pègre, Grenoble, Arthaud, 1935
Hollywood, la Mecque du cinéma, Paris, Grasset, 1936
Histoires vraies, Paris, Grasset, 1937
La vie dangereuse, Paris, Grasset, 1938
Chez l'armée anglaise, Paris, Corréâ, 1940
D'outremer à indigo, Paris, Grasset, 1940
L'Homme Foudroyé, Paris, Denoël, 1945
La main coupée, Paris, Denoël, 1946
Bourlinguer, Paris, Denoël, 1947
La Banlieue de Paris, Paris, Seghers, 1949
Le lotissement du ciel, Paris, Denoël, 1949
Blaise Cendrars vous parle... , Paris, Denoël, 1932
Le Brésil, des hommes sont venus, Monaco, Les Documents d'Art,
1952
Noël aux quatre coins du monde, Paris, Chez Robert Cayla, 1953
Emmène-moi au bout du monde !..., Paris, Chez Robert Cayla, 1953
Entretien de Fernand Léger avec Blaise Cendrars et Louis Carré sur
le paysage de l'œuvre de léger, Paris, Louis Carré, 1956
Du monde entier au cœur du monde (poésies complètes), Paris, Denoël,
1957
Trop, c'est trop, Paris, Denoël, 1957
Films sans images, Paris, Denoël, 1959
Amours (1914), Paris Seghers, 1961
|